Croisement des savoirs en Bolivie : la violence faite aux femmes

Roxana Quispe, Soledad Ortiz, Emma Poma, Kassandra Vilca et Patricia Urquieta (en photo principale de l’article), ont achevé depuis peu la formation diplômante du « Croisement des savoirs en Amérique latine », un programme de deux ans proposé par l’Université autonome métropolitaine de Mexico en collaboration avec ATD Quart Monde.

Roxana, Emma et Kassandra sont militantes Quart Monde, Soledad s’est engagée comme volontaire permanente au sein de l’équipe d’El Alto, et Patricia est professeure d’université et alliée d’ATD Quart Monde. À elles cinq, elles forment l’équipe de coordination d’un nouveau projet de Croisement des savoirs. Une initiative qui vise à engager une réflexion sur les violences faites aux femmes en situation de pauvreté et à améliorer leur situation de manière durable.

À l’occasion du 8 mars dernier, Journée internationale des droits des femmes, elles ont exposé les raisons qui les poussent à entreprendre ce projet en Bolivie.

Définir le thème de la recherche

Toute action de Croisement des savoirs vise à engager une réflexion sur des questions relatives à la lutte contre l’extrême pauvreté et au changement social. En définissant notre problématique, nous avons réalisé à quel point nous nous sentions toutes profondément affectées par le problème de la violence à l’égard des femmes en Bolivie, à quel point chaque nouvelle annonce de féminicide devenait notre « pain quotidien ».

Notre intention est d’approfondir la réflexion sur les violences subies par les femmes en situation de pauvreté.

Dans cette perspective, nous avons collaboré avec une quarantaine de personnes, incluant des professionnels, des enseignantes-chercheuses et des femmes en grande difficulté économique. L’objectif était de construire un nouveau socle de connaissances autour du lien entre extrême pauvreté et violences faites aux femmes, sans perdre de vue le fil conducteur de la démarche : l’expérience des personnes démunies.

Les étapes préalables au processus de Croisement des savoirs

Avant toute chose, il nous a semblé essentiel d’organiser des ateliers préalables afin que l’ensemble des participants au projet puisse faire connaissance dans un climat de confiance. Il était également important de se rencontrer en tant qu’équipe, de se reconnaître dans une expérience commune et de se préparer à suivre un processus portant sur un sujet particulièrement douloureux. Nous avons souhaité instaurer un cadre dans lequel les militantes se sentiraient libres de s’exprimer sans crainte et trouveraient auprès des autres une force émotionnelle, nécessaire pour croiser leurs savoirs.

Écouter chacune de ces personnes s’exprimer sur le sujet nous a confortées dans notre approche : il est crucial d’identifier, de rendre visible et de débattre des violences dont sont victimes les femmes en situation de pauvreté. Pour changer les choses, il faut les rendre publiques. Nous sommes en droit de nous demander quel est l’aspect le plus révoltant des violences que subissent les femmes démunies. Et nous sommes convaincues que ce questionnement nous aidera à trouver les moyens de lutter ensemble pour remédier au plus vite à cette double injustice.

Et ensuite ?

À l’issue des ateliers préparatoires, nous avons toutes eu le sentiment, au même titre que les autres participants, que nous abordions là un sujet majeur. Les militantes ont nourri cette réflexion de leur expérience et de leurs interventions, et ont également exprimé leur profond désir de s’engager dans le processus de Croisement des savoirs que nous leur proposons. Ce dernier a d’ailleurs été reconnu comme un outil précieux par les professionnels de la lutte contre les violences faites aux femmes et les universitaires se sont montrés très enthousiastes à l’idée d’apprendre des expériences de chacun.

Le simple fait d’aborder ce sujet est en soi une façon de briser le silence, de mieux comprendre et de mettre en valeur l’expérience et les opinions de nombreuses femmes qui, bien que victimes, sont aussi des guerrières.

Puis, pendant plusieurs mois, nous avons réfléchi aux stratégies à adopter dans la lutte contre la violence faite aux femmes en situation de pauvreté en Bolivie1. Des approches qui, nous l’espérons, sauront être profitables et inspirantes pour les femmes du monde entier.

Ce processus de Croisement des savoirs se conclut actuellement avec une série de séminaires et d’événements destinés à en divulguer les résultats. Grâce à cette phase de diffusion, les co-chercheurs souhaitent contribuer à façonner un monde où chacun pourra vivre dignement et s’épanouir.

  1. Le produit de cette réflexion, notamment un manifeste écrit par ce groupe, sera présenté dans un prochain article
  1. Bravo, pour votre courage et détermination, ce serait indispensable de faire un croisement des savoirs sur ce thème dans plusieurs pays.

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