« Yere a yeke Ngangu », le film « la misère est violence» en sango

Dans un contexte difficile où la violence a de nouveau surgi dans les quartiers de Bangui, le travail en faveur de la paix mené par les membres d’ATD Quart Monde en Centrafrique, tout comme leur souci de préserver les liens à travers des rencontres et une présence à la Cour, sont précieux.  Le doublage du film « la misère est violence » en sango, langue nationale  (voir la vidéo ci-dessous) contribue à l’action d’ATD Quart Monde en faveur de la paix.

Retour sur les étapes de cette aventure de fierté qui a relié par un fil invisible 60 délégués à l’Unesco en janvier 2012, un membre d’ATD Quart Monde en Centrafrique en 2013, une équipe d’amis et militants dans un studio de Bangui en 2015 et un technicien audiovisuel en Bourgogne….

En ce début 2013, Oliphax se cale sur un clavier

Le Mouvement ATD Quart Monde a organisé en janvier 2012 un Colloque international qui a rassemblé des personnes de toutes conditions, porteuses de savoirs d’expérience et de vie ou de savoirs académiques. Ensemble elles ont su dire : « La violence est misère, rompons le silence, cherchons la paix ».

Un film de 26 minutes a été réalisé en 2012. Il a été diffusé dans le monde. A Bangui, en République Centrafricaine, l’équipe d’ATD Quart Monde voyait que bien des auditeurs étaient curieux de comprendre dans leur propre langue la pensée de ceux qui parlaient à l’écran : leurs vies, leur expression, et leur environnement étaient si proches !

C’est ainsi qu’Oliphax, membre d’ATD Quart Monde en RCA a accepté de faire la traduction du script. En ce début 2013, Oliphax se cale sur un clavier, et commence à venir chaque semaine à son ouvrage. Une fois, deux fois, trois fois… et en mars 2013 éclate le coup d’état qui ouvrira un long cycle de transitions chaotiques. Oliphax appelle quelques jours après : il est réfugié « vers la ferme familiale » à plusieurs dizaines de km de la capitale. Ce sera la dernière nouvelle que l’équipe ATD Quart Monde de Bangui aura de lui ; son travail de 20 pages est archivé…

Près de deux années passent

Un matin de mars 2015, le portail de la Cour ATD de Bangui laisse passer un jeune homme. « Mais ? C’est bien toi ? » Oliphax est de retour. Son récit, discret et pudique, retracera des allées et venues, à l’image de celles de tant de familles qui ont connu le même sort. Il a réussi à retaper une « boutique » (une caisse en bois de 2m x 2m peinte aux couleurs vives avec une petite fenêtre et son stock de biscuits, bonbons, pansements, allumettes et autres produits dont chaque famille a besoin au quartier) et est prêt à reprendre. « Reprendre quoi ? » « Le film, bien sûr !! »

Tout va alors très vite : Oliphax réalise le lissage de son texte, celui-ci est passé dans les mains de deux lecteurs, qui amendent, approuvent, confirment des tournures ; un volontaire-permanent du Mouvement ATD Quart Monde, basé en France dans l’équipe communication et qui fait des vidéos, donne les derniers conseils.

Il ne reste plus qu’à rassembler des « voix ». Le recrutement des « actrices et acteurs » permet à 8 militants et amis d’ATD de se rassembler avec cet objectif : permettre au public centrafricain d’entendre dans sa propre langue des mauriciennes, des malgaches, un liégois de Belgique, une anglaise et une maman guatémaltèque, avec au passage un délégué général !

Encore des péripéties pour trouver un studio dans un Bangui encore instable. Mais nos amis se préparent à la lecture, à la tonalité… Et après deux rencontres de répétitions, les 8 artistes entrent dans le studio du Réseau des Journalistes pour les Droits de l’Homme de Bangui, pour enfin donner une voix « sango » à ces femmes et hommes de tant de continents !

Une fois les dossiers audios envoyés au technicien, travailleur à distance délocalisé en Bourgogne et quelques dizaines d’heures enfermé dans son studio, voici la naissance du film « Yere a yeke Ngangu » !

Il ne reste plus qu’à mettre en valeur cet outil, au cours des rencontres de formation, de rassemblements de citoyens pour refuser la misère, de réunions de quartiers, etc.

Ce fil invisible, qui rassemble de tous pays des femmes et des hommes dans leur lutte continue contre la violence de la misère, est un fil qui parle. Il murmure au cœur et à l’intelligence de tant de centrafricains : eux aussi s’unissent et travaillent au bel ouvrage de la paix, remède à la violence de la misère.

« Yere a yeke Ngangu » – La misère est violence en sango (28′)

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