On est tous des histoires, jamais des étiquettes

Noldi Christine raconte comment il a vécu une rencontre des « Assises du Mouvement 2012 »

Cela m’aide toujours de retrouver des personnes qui essaient de renouer des liens dans ce monde divisé et blessé : M., du Kreuzberg à Berlin, quartier décrié, qui veut rester fidèle à ses amis d’enfance qui n’ont pas pu faire des études comme lui. Z., qui a réussi à permettre la rencontre entre une femme riche des Philippines et des familles qui vivent sous un pont à côté d’un canal. C., de Pologne, un homme qui a fait l’expérience de la pauvreté dans la rue, avec son visage grave, des béquilles, une jambe amputé. A un moment donné il nous a dit : « J’ai dû re-décider si je voulais continuer à vivre. Je l’ai fait, parce que je sais que d’autres ont encore besoin de moi. » Ainsi nous sommes repartis renforcés, enrichis par plein de bouts d’histoires, qui après font leur chemin en chacun de nous.

Dans l’assemblée une jeune femme, que j’ai connue enfant dans une cité d’urgence en Suisse, a aussi lancé ce cri du cœur : « Mais enfin, quand arrêtera-t-on d’enfermer des gens derrière des étiquettes qui les réduisent ? Même le mot « militant » dans le Mouvement, peut paraître par moment ambigu et devenir blessant ! » Dans la conclusion Eugen Brand a repris : « On est tous des histoires, jamais des étiquettes… » Comment le dire mieux ? Oui, une vraie histoire est le contraire de toute (mauvaise) définition, elle n’est jamais limitation ou réduction, elle est beaucoup plus dense et profonde. Tendresse…

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Notre fil rouge… Détruire la misère, tous ensemble, main dans la main et bâtir la paix.

C’est pour cela aussi que j’ai tant aimé cet « arbre-flamme » que nous avons pu « faire grandir » avec nos mains (nos mains découpées dans du bois ou du carton, puis peintes, gravées, pyrogravées, décorées) dans des ateliers. Comme si en s’affrontant à la matière, on retrouvait la vie entière, le poids des mots.

Dans le même sens, ensuite, nous nous sommes arrêtés justement sur des mots : « La misère est violence… Résister… Rompre le silence…. Créer la paix ». Comme bien d’autres, j’ai beaucoup aimé ce moment. Peut-être aussi parce que j’ai pu chercher les mots correspondants dans ma propre langue. En allemand, on trouve dans le mot violence (Gewalt) aussi « Ver-waltung (Armut ver-walten : gérer la pauvreté). Souvent, entrer dans les mots d’une autre culture, fait des déclics. Cela aide aussi pour que nos mots-clés ne deviennent pas des slogans ou une idéologies, mais restent sources…

Un moment extraordinaire à la fin… A quelques uns, nous avons pu vivre des heures inoubliables dans la nuit, quand nous avons fait le montage de la composition des mains comme une sculpture… C’était comme une méditation, un chant… Chercher la place de chaque main : les tristes, les lourdes, les belles, les fortes, les fragilisées-malades… L’ami du Monsieur polonais aux béquilles a alors dit : « On dirait que cela ressemble un peu à Noël, oui c’est un sapin de Noël… C’est la paix… »

Noldi Christen