Protéger les innocents et réduire la justice populaire à Bukavu : un enjeu crucial pour la société et la santé mentale des enfants

La situation dans l’est de la République Démocratique du Congo
La situation sécuritaire actuelle en République Démocratique du Congo a un impact profond sur les enfants, témoins d’événements tel que la justice populaire1.
Bordée par le lac Kivu et proche de la frontière avec le Rwanda, Bukavu 2 est un centre économique et administratif majeur où les habitants sont principalement jeunes et vivent du commerce, de la pêche, d’échanges transfrontaliers, ou d’activités informelles.
Elle est actuellement marquée par des conflits armés et une instabilité chronique qui affectent profondément sa population en raison de l’occupation du AFC/M23, un groupe rebelle soutenu par le Rwanda. Cette occupation a entraîné une recrudescence des violences, notamment des pillages et des affrontements entre les forces armées congolaises (FARDC) et les rebelles AFC/M23. La population vit dans une insécurité constante, avec des cas d’attaques nocturnes signalées dans plusieurs quartiers. La criminalité prend ainsi de l’ampleur dans la ville.
Les impacts de la guerre sur les enfants
Dans le contexte actuel du conflit, les enfants comptent parmi les principales victimes. Beaucoup souffrent de traumatismes psychologiques dus aux violences auxquelles ils assistent. Certains sont recrutés de force par des groupes armés, tandis que d’autres subissent des violences sexuelles ou des exécutions sommaires. En outre des dizaines de milliers de familles sont déplacées, perturbant l’accès des enfants à l’éducation et aux soins de santé.
Cette situation laisse les citoyens sans protection, les poussant à recourir à la justice populaire. Par l’absence d’un système carcéral structuré, les habitants, désespérés, prennent en main leur propre défense à travers des actes de violence extrême : des exécutions sans preuve, punitions disproportionnées par rapport aux délits commis. Ce cycle de brutalité met en péril les valeurs fondamentales de la justice et de la dignité humaine.
Les enfants, témoins de ces atrocités, grandissent avec une perception déformée de la justice et de la valeur de la vie humaine. Cette exposition permanente à la violence risque de normaliser l’usage de la brutalité comme mode de résolution des conflits, entraînant des conséquences négatives à long terme. Ceux qui sont non accompagnés ou issus de familles instables sont particulièrement vulnérables et risquent de développer des comportements violents, recourant à des moyens tels que l’alcool et la drogue.
Maintenir le lien malgré les activités suspendues
Dans cette période de guerre, les rassemblements sont interrompus et les animations des enfants Tapori suspendues. Pour maintenir un lien avec les enfants, des visites à domicile ont été organisées. Pendant cette période, les animateurs Tapori visitent des membres du Mouvement à leurs domiciles, encourageant les parents à dialoguer régulièrement avec leurs enfants et à leur offrir un suivi psychologique adapté. Ces visites leur ont permis de connaître les difficultés que traversent leurs pairs et de compatir avec eux car il est essentiel d’éloigner les enfants des scènes de justice populaire et d’éviter les discussions sur ces sujets en leur présence.
Pour restaurer le tissu social et garantir une justice équitable, il serait impératif de restaurer le système judiciaire afin de rapprocher les citoyens de la justice, de réhabiliter les maisons carcérales et de protéger les innocents, notamment les enfants qui sont les premières victimes silencieuses de ce fléau et préserver l’avenir des générations futures.
Sensibiliser la communauté internationale à cette problématique est crucial pour éviter qu’une nouvelle génération ne soit marquée par la violence et l’instabilité émotionnelle. Il s’agit d’une responsabilité collective : garantir un cadre de vie sain et sécurisant aux plus jeunes.
Écrit par Aganze Arsene