Les Nations Unies et ATD Quart Monde dialoguent sur le placement des enfants

Aux Nations Unies, ATD Quart Monde collabore régulièrement avec d’autres ONG pour organiser des rencontres informelles sur des thèmes liés à la pauvreté, au développement durable et à l’Agenda 2030 de l’ONU. La série de discussions dans le cadre « Ne laisser personne de côté » inclut systématiquement des intervenants qui ont eu une expérience directe sur le sujet.

Cette rencontre a été organisée avec l’ONG SOS Villages d’Enfants et Bahái International Community, avec le soutien de la délégation permanente de l’Autriche aux Nations Unies.

Sofia Garcia Garcia (SOS Villages d’Enfants) a ouvert la rencontre en rappelant que les enfants privés de présence parentale sont souvent les enfants les plus oubliés et les plus négligés par les politiques publiques.

En terme de politiques publiques et de bonnes pratiques, l’Autriche a toujours été l’avocate du droit des enfants. Le pays a été impliqué dans la promotion des principes directeurs des Nations Unies pour l’enfance. La rencontre a proposé un passage en revue des efforts de l’Autriche pour l’amélioration des alternatives à l’éducation parentale et de leurs lieux d’accueil, ainsi que des tentatives pour transférer plus d’enfants de ces maisons vers les familles d’accueil. Il y a un certain nombre de défis qui se posent quand on veut soutenir les enfants qui vont d’une famille d’accueil ou d’un foyer à un mode de vie indépendant. Gérer le nombre grandissant de mineurs sans accompagnement et d’enfants réfugiés est également un problème de plus en plus important.

Des sujets essentiels ont émergé de cette discussion :

  • Un enfant qui perd ses parents perd aussi son premier rempart contre l’adversité.
  • Il est important d’empêcher les séparations inutiles entre les parents et les enfants.
  • Tous les enfants et les adolescents sans présence parentale doivent avoir une chance de prendre en main leur futur et de devenir des acteurs indépendants de la société. Ils ont le droit de vivre dans un environnement attentif et protecteur.
  • L’éducation ainsi que le soutien affectif sont essentiels pour les enfants qui vivent sans présence parentale.
  • Les travailleurs sociaux impliqués auprès des enfants doivent recevoir des salaires décents et un vrai soutien professionnel car leur travail affecte la vie des enfants.

Les personnes présentes ont convenu que les Nations Unies doivent poursuivre les efforts autour des enfants qui sont les futurs ambassadeurs du monde. Les enfants confiés à l’assistance sociale ont besoin de plus de soutien que les enfants qui vivent chez leurs parents. C’est d’autant plus vrai pour leur développement personnel ; ces enfants doivent continuer à avancer dans la vie. Le gouvernement a un rôle central à jouer. Les enfants placés manquent souvent d’occasions d’apprendre les compétences essentielles que les parents transmettent. Il est nécessaire de mettre en place des programmes autour des compétences quotidiennes pour s’assurer que ces personnes qui ne vivent pas avec leurs parents ne soient pas laissés de côté.

De gauche à droite, Jatharine Konzett-Stoffl et Jan Kickert, délégation autrichienne, Cristina Diez, ATD Quart Monde

L’importance d’éviter la séparation entre les parents et les enfants quand elle n’est pas nécessaire est à la base du travail d’ATD Quart Monde à travers le monde. Depuis des décennies et dans bien des pays, comme l’Irlande, l’Espagne, la France et la Suisse ainsi que dans des régions d’Europe de l’Est et d’Asie Centrale, le noyau familial a été systématiquement menacé par la séparation des enfants et des parents, pour la seule raison que la mère n’était pas mariée ou que la famille était pauvre. Comme il est décrit dans « Enfants et parents séparés en Europe : du silence à la reconnaissance des violences vécues » :

« Sous prétexte de moralité ou de lutte contre la pauvreté, la société et les politiques publiques ont traité les familles les plus vulnérables de façon totalement inhumaine depuis des décennies, privant des milliers d’enfants de l’affection de leurs propres parents ».

L’Université Populaire Quart Monde de mars 2016, en Belgique, a montré que les personnes qui vivent dans la pauvreté ont l’impression que les services sociaux pour l’enfance et le placement dans des foyers et des familles d’accueil faisaient plus de mal que de bien aux familles qui se battent pour rester unies. La vie dans les structures d’accueil est préjudiciable au développement des enfants ; la maltraitance et la négligence ne sont pas repérées dans les foyers, où les services sociaux ne surveillent pas autant les enfants que lorsqu’ils vivent avec leurs parents.

ATD Quart Monde a souligné depuis bien des années l’importance du soutien à accorder aux familles dans leurs efforts pour élever et éduquer leurs enfants (voir « How Poverty Separates Parents and Children » et la Conférence régionale « Femmes et pauvreté »). En rassemblant des histoires de familles dans beaucoup de pays, ATD Quart Monde a montré les effets délétères de la séparation des enfants et des familles.

Des programmes comme la Frimhurst Family Home d’ATD au Royaume-Uni offrent un soutien aux familles, dans un environnement où elles peuvent se détendre, passer ensemble des moments agréables, développer de nouvelles compétences et rencontrer d’autres familles qui partagent leur situation, dans un contexte respectueux et sans subir le jugement des autres. Le travail d’ATD Quart Monde montre que, à condition de recevoir un soutien approprié, des parents qui risquent de se voir enlever leurs enfants peuvent devenir des parents accomplis. Un aspect essentiel de ce soutien est de fournir aux parents un environnement où ils ne sont pas surveillés.

« Des projets de cette nature révèlent les nombreux efforts cachés que les parents et les enfants qui vivent dans l’extrême pauvreté font pour pouvoir rester ensemble. Si la détermination de ces parents et de ces enfants à vivre ensemble est si forte, qu’arriverait-il si nous osions la placer au centre de nos politiques de lutte contre la pauvreté ? Et si s’appuyer sur cette volonté des familles à rester ensemble nous permettait de mettre fin une fois pour toutes à l’extrême pauvreté ? » (« How Poverty Separates Parents and Children »).

Wenyan Yang, directeur de la Branche pour la Perspective Sociale sur le Développement de l’ONU, Division pour les Politiques Sociales et le Développement

Téléchargez les notes de la discussion et le programme de l’événement en anglais.

Pour plus d’informations sur le soutien d’ATD Quart Monde aux familles et le plaidoyer de l’équipe ATD Quart Monde International.