Tisser des liens | Isabelle Pypaert Perrin

Par Isabelle Pypaert Perrin

Notre message de printemps relate l’histoire d’une maman qui avec ses mains, sa créativité, retisse des liens familiaux brisés par la misère et tisse des liens nouveaux par delà les frontières…

Elle coupe, découpe, recoupe… morceaux d’image, bouts de fil, bouts de vie, pour retisser les liens avec les siens, retracer une partie de leur histoire commune. Carine est une mère qui se bat pour ses enfants, elle qui n’a pas toujours pu les voir grandir. Aujourd’hui elle n’a plus rien… Les photos, les souvenirs de la vie ensemble, tout a disparu, englouti par les déménagements et les inondations. Alors, depuis plusieurs mois, elle découpe des images dans des magazines pour les coller dans un cahier. Sur la couverture, elle a écrit ce titre étonnant : «  Comme un rapport d’activité  ».

Page après page, consciencieusement, elle fait renaître ainsi les moments avec ses enfants. Elle veut prouver qu’elle a été là. Qu’elle aussi a été une mère : la visite au musée, les ateliers de broderie, la peinture, les livres, la découverte de l’ordinateur… Mais il manque toujours les photos, preuves irréfutables de ces moments du passé en famille.

Françoise, volontaire, a pu en retrouver dans les archives d’ATD Quart Monde. Page après page, alors, comme un patchwork, les morceaux sont recollés. Les liens d’une vie sont retissés.

Quelque chose d’utile pour réconforter les autres

Des liens, cette maman vient d’en tisser d’une tout autre manière. Un jour, Françoise est venue accompagnée de Kysly, son co-volontaire. Il est haïtien et leur raconte le tremblement de terre et le courage des mamans qui ont voulu comme avant se retrouver pour continuer à prendre soin ensemble de leurs bébés(1).

Touchée par ce qu’elle entend, ces maisons, ces vies détruites, ces souvenirs engloutis par le séisme, Carine décide d’entreprendre, après celui de sa vie, un deuxième patchwork. Et avec la même tendresse, la même obstination, pendant les jours et les semaines qui suivent,elle tricote des carrés de toutes les couleurs. Assemblés, ils forment maintenant une grande couverture pour ces bébés et leurs parents du bout du monde dont elle se sent si proche. Avec son cadeau, elle leur écrit  : «  Cette couverture, c’est presque rien mais ça vient du cœur. C’est ma chaleur humaine. Je veux passer mon temps à quelque chose d’utile pour réconforter les autres  ».

Des gestes silencieux et précieux

Liens familiaux recréés dans un beau cahier pour laisser aux enfants des traces de la vie ensemble. Liens de laine tissés pour d’autres enfants à l’autre bout du monde. Autant de gestes silencieux et précieux qui rejoignent ceux de tant de femmes et d’hommes. Souvent ignorés ou incompris, ces gestes nous rappellent pourtant l’aspiration des personnes les plus pauvres à contribuer avec leurs mains, leur intelligence et leur cœur, à l’avenir du monde.

Merci de nous permettre, par votre amitié et votre soutien financier, de continuer à être présents aux côtés de ces familles, témoins des liens qu’elles tissent et retissent, pour que naisse une humanité que la misère ne déchirera plus.

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Photo ATD Quart Monde du patchwork réalisé par Carine pour les familles d’Haïti